L'homme qui inspira le Coca-cola
Angelo Mariani
Retranscription
I. 1838-1859
Angelo Mariani, de son vrai nom Ange-François Mariani, est né le 17 décembre 1838 au sein d’une famille bourgeoise de médecins et de pharmaciens corses. On ne sait que peu de choses de ses jeunes années, avant qu’il ne se fasse connaître en tant qu’inventeur du vin tonique Mariani, l’ancêtre du coca-cola ! On sait qu’en 1859, il s’installa à Paris pour travailler comme chimiste. C’est à ce moment que Mariani a découvert les études de Paolo Mantegazza sur la plante de coca. Il fut ensuite fasciné par la découverte d’Albert Niemann : la cocaïne.
II. 1862
Quelques années plus tard, en 1862, le phylloxéra ravagea la France.
Ce petit parasite arriva sur le bétail importé en bateau à vapeur
depuis les États-Unis et apparut d’abord dans la vallée du Rhône. Il
lui fallut moins d’une saison pour inonder la vallée, puis gagner la
vallée voisine. Puis une autre. Et une autre. Et encore une autre. En
moins de dix ans, les vignes françaises furent décimées et la production
de vin tomba en chute libre.
Cette tragédie modifia la consommation des Français qui se tournèrent
davantage vers les spiritueux. Les pousse-cafés, le sherry, et l’absinthe
remplacèrent le vin. C’est alors qu’Angelo mis sa fascination pour la
coca en bouteille et changea la manière de boire du monde entier.
Pour toujours.
III. 1863
En 1863, alors âgé de seulement 25 ans, Mariani commercialisa un médicament breveté qu’il baptisa Vin Tonique Mariani à la Coca du Pérou. Composé d’une infusion de 3 variétés de feuilles de coca dans du vin de Bordeaux, le Vin Tonique Mariani fut immédiatement salué comme un stimulant idéal de l’estomac, un analgésique des voies respiratoires et des cordes vocales, un coupe-faim, un anti-dépresseur, et comme traitement de l’anémie. La dose recommandée était de deux ou trois verres de vin par jour bus 30 minutes avant ou juste après le repas. Chaque verre de 30ml de vin Mariani contenait 6 milligrammes de principe actif, la cocaïne.
IV. 1864-1883
Mariani ne s’est pas arrêté à ce simple succès. Dans son laboratoire de
Neuilly-sur-Seine, il développa l’Elixir Mariani, une version spiritueuse
avec trois fois plus de principe actif. Il produisit ensuite le Pâté Mariani
et les Pastilles Mariani, supposés renforcer les cordes vocales. Suivirent
ensuite les bains de bouche, spray et infusions. Mais aucun autre produit
ne reçut autant de louanges que le Vin Tonique Mariani.
Têtes couronnées, papes, chefs d’état, scientifiques, inventeurs, écrivains,
danseurs, tous adoraient le Vin Mariani. Léon XIII, Pie X, la Reine du
Portugal, Le Roi d’Espagne, le Prince de Bulgarie, la Reine de Roumanie,
le Roi du Cambodge, le Président des Etats-Unis Mc Kinley, l’ambassadeur
de l’empereur de Chine, Raymond Poincaré, Anatole France, Felix Faure,
Maurice Bertheaux, Thomas Edison, Alexandre Dumas, Sarah Bernhardt, Jules
Verne, HG Wells, Emile Zola, Loïe Fuller, Auguste et Louis Lumière, Edmond
Rostand, Louise Michel, Auguste Rodin, Louis Blériot, Georges Feydeau, Jules
Renard, Puvis de Chavanne, Georges Courteline, Octave Mirbeau, Eugene Grasset,
Henri Martin, Henrik Ibsen, Le préfet Poubelle, René Bazin, Jules Simon,
Leon Bloy, Mucha, Odilon Redon, Cécile Sorel, Emile Loubet… Les témoignages
remplissaient 15 volumes reliés de cuir.
V. 1884-1885
Le succès appelle toujours la concurrence. Des imitations virent le jour :
la Coca des Incas ou le Vin des Incas, par exemple.
En 1884, un pharmacien, John S. Pemberton, lança le French Coca Wine à
Atlanta, en Georgie. Et il aurait sans doute connu un autre succès fulgurant
s’il n’avait pas contenu du vin. Le Klu Klux Klan lutta activement pour le faire
interdire, et obtint sa prohibition en 1885. Pemberton dut reformuler son
produit, et remplaça le vin par de l’extrait de cola et du soda. Le Coca-cola
était né.
VI. 1904-1914
Le fort taux de cocaïne du produit de Pemberton ainsi que d’autre concurrents
américains forcèrent Mariani a augmenter ses dosages à 7.2mg par verre pour le
marché US. Mariani ouvrit un bureau au 52 West 15th Street à New York, ainsi que
des filiales à Londres et Montréal.
Le siècle touchant à sa fin, il devint finalement flagrant en Europe et aux
États-Unis que la dépendance à la cocaïne était un véritable problème. Coca-cola
fut forcé de dénaturer son extrait de coca en 1904. Deux ans plus tard, le Pure
Food and Drug Act obligea Mariani à affirmer qu’il n’y avait pas de cocaïne, et
seulement des feuilles de coca, dans son vin. Mais le vote du Harrisson Act en
1914 contrôlant encore plus étroitement les ventes de feuilles de coca et de ses
dérivés signa la fin des ventes américaines de vin Mariani.
Cela importait peu à Angelo Mariani. Son tonique ne contenait déjà plus de cocaïne
à partir de 1910. En 1914, trois mois avant que n’éclate la première guerre
mondiale, le chimiste s’éteint, emportant le secret de son merveilleux vin dans
la tombe. Il est enterré au cimetière du Père Lachaise, à Paris.
3 liens pour aller plus loin
The Nonist Blog : Vin Mariani
En 1863, après avoir lu un article sur les recherches de Paolo Mantegazza (qui fut le premier à extraire la cocaïne de la feuille de coca) et en avoir deviné le potentiel économique, Angelo Mariani, un chimiste corse, s’est mis en tête de créer un « tonique » de son cru.
Bibliothèque nationale de France : album Mariani (3e volume)
Le 3e des 15 volumes reliés de cuir publiés par Mariani, contenant les félicitations et remerciements de personnalités du monde entier. Dans ce volume, parmi d’autres, Thomas Edison, Auguste Rodin, Emile Zola.
Crédits
Scénario : Anistatia Miller & Eric Drier
Direction artistique : Sebastien Brothier
Animation : Jérôme Gonçalvès
Illustration sonore : Greg Corsaro
Narration : Antony Hickling